Sunday, May 6, 2012

Huangshan (Tangkou): Le coup de dés

Partout où vous cherchez sur Internet, l'information sur Huangshan est plutôt contradictoire. Pour vous rendre à la montagne jaune, vous devez prendre un autobus pour Huangshan, mais pas celui qui vous amène à la ville, car vous vous trouverez à 2h de votre profit. Certaines sources, vous invitent plutôt à vous rendre à Tangkou, la véritable porte de la montagne jaune, mais les moyens de transport pour s'y rendre sont aussi fréquent qu'un agent touristique chinois qui parle anglais et l'incertitude d'être pris dans une ville chinoise inconnue, sans aucune aide extérieure, décourage plusieurs voyageurs téméraires... Voici donc l'information en exclusivité: Pour vous rendre au téléphérique de la montagne, vous devez vous rendre à la gare d'autobus West de Hangzhou où vous trouverez des véhicules allant régulièrement à Tangkou d'où vous commencerez votre périple à la base de Huangshan. Voilà c'est fait et pour les deux touristes confus et maintenant illuminés par mon travail acharné de reporter: ''Tout le plaisir est pour moi!''.

C'est donc en prenant une chance que nous avons fait la file pour l'autobus de 7h quittant le centre-ville de Hangzhou pour les pâturages plus verts de la campagne chinoise. Allégés de notre gros sac, nous partions avec l'essentiel: le sac de couchage extra-pratique (...et anti-germes, tâches et autres trouvailles mythologiques dans les draps des auberges chinoises) fabriqué par ma mère, un imper et des victuailles - mais tout de même avec une trousse de maquillage complète, ''car, qui veut avoir une face d'altitude défraîchie sur les 200+ photos que nous allions sûrement prendre dans les prochaines 24 heures? La barre granola détrônée par le fond de teint pourrait nous attendre sagement à l'hôtel. Par une certaine chance pour mon mal des transports intermittent (plus sur le sujet quand je parlerai de Xi'an), nous avions les deux premiers sièges du véhicule - couteau à deux tranchants - car ça nous donnait une vue imprenable sur les paysages, mais aussi sur la conduite ''sportive'' du chauffeur. Il a d'ailleurs dû faire une face en nous voyant s'asseoir directement derrière lui, car il savait d'expérience que d'avoir deux étrangères à ses côtés ferait que sa conduite serait constamment agrémentée de ''Ahhhh'' et de ''Yissshhh''... Zut de zut, qu'est-ce qu'un gars doit faire dans cette ville pour pouvoir regarder tranquillement son film en conduisant? Bref, l'autobus presque vide était maintenant en chemin et la perspective de découvrir de nouveaux reliefs nous rendait presque euphoriques. Qu'est-ce qui nous attendait à Tangkou et est-ce que cette montagne saurait égaler sa réputation d'inspiration pour les paysages volants du film Avatar? C'est ce que nous allions découvrir dans ''seulement'' 3 heures de route... Yishhh... L'excitation aurait peut-être un peu le temps de se calmer alors nous avons sorties nos couvertures pour profiter des sièges confortables et du ''bercement'' de l'autobus changeant brusquement de voie à 100km /h toutes les quelques minutes.

À ma grande surprise, en inclinant mon siège, j'ai remarqué qu'il y avait un autre étranger à bord du bus. Même un an plus tard, la vue d'un blanc seul à l'extérieur de Pékin ou de Shanghai me donne toujours l'impression d'avoir repéré un enfant perdu dans un centre d'achat et je dois me retenir de toutes mes forces pour ne pas lui demander si ''ta maman sait où tu es mon grand?!''.  Quand même, j'avais fait la même chose l'an dernier, alors que mon instinct maternel caché quelque part dans le plus profond de mon être semblait croire qu'il ne pouvait se retrouver si loin des métropoles que par inadvertance et que je devais ''tous les sauver!''. Bref, j'ai décidé de me mêler de mes oignons et j'ai continué à regarder par la fenêtre où des champs de fleurs jaunes à perte de vue entouraient quelques petites bicoques de fermiers à flanc de montagne. Telles les chèvres alpines dansantes de ''Sound of Music'', les paysans d'Hangzhou effectuaient leurs récoltes de thé dans les terrains les plus improbables, parfois sur des pentes s'approchant dangereusement de 90 degrés du sol et ma mère et moi, nous grattions la tête en se demandant comment ils pouvaient bien s'installer confortablement pour ''cueillir'' lorsqu'ils devaient pratiquement se coucher dans la plante pour ne pas partir à la renverse dans le vide. Je n'ai pas vérifié, mais ils doivent sans doute avoir une jambe plus courte que l'autre!

Après un solide 3h de route, l'autobus s'est arrêté devant un petit restaurant de Tangkou où le patron avait affiché des posters des différents animaux sur son menu à même la fenêtre. Lapin, tortue, canard et autres originalités locales. Je ne pense pas qu'au Canada on présenterait comme des mannequins culinaires la véritable source des constituants de votre assiette pour vous attirer à l'intérieur de l'établissement. Par chez nous, on préfère la nourriture sans visage, mais les Chinois demandent régulièrement de voir la ''bette'' de l'animal qu'ils dégustent pour en juger la qualité! Du moins, j'ai décidé de garder mes index bien cachés dans mes poches de peur de gesticuler vers Caroline (ou Benjamin si c'est un mâle!) la tortue et qu'elle se retrouve dans mon assiette. En sortant du bus, j'ai tenté tout de suite de repérer des pancartes indiquant la direction du téléphérique, mais une petite Chinoise en tablier me bloquait le chemin, gesticulant pour savoir quel était ''le plan''. Je n'en avais aucune idée et après avoir remarqué que l'autre blanc s'était immédiatement fait la valise avec des Chinois sans demander son reste, c'était à mon tour d'avoir l'air perdu dans le centre d'achat! Finalement, la femme m'a expliqué qu'un homme nous guiderait à la montagne... mais après avoir mangé bien entendu! Si vous le dites madame, passez-moi le catalogue de vos meilleurs vendeurs!

La cuisine conviviale chinoise est réellement une expérience à ne pas manquer et je ne parle pas ici de petits plats comme ceux de votre grand-mère, mais plutôt d'un repas où la moitié des employés du resto passent leur temps à vous respirer au dessus des épaules pour vous poser toutes sortes de questions et vous observer la grosseur du nez... à ce niveau, ils ne sont jamais déçus avec moi! Nous en avons aussi profité pour regarder la carte de Huangshan et le nombre de pistes et de sommets ne faisait que présager que cette montagne était un véritable monstre, petite ville en altitude où il est même possible de faire un tour à la banque!

Après une quinzaine de minutes dans un téléphérique qui ne tient littéralement que par un fil, nous étions au premier sommet, prête à escalader les centaines de marches vers notre hôtel. Contrairement à ma visite à Huashan, la foule était plus compacte et les sentiers moins étroits, mais la vue était tout aussi impressionnante. Des précipices profonds et des falaises acérés où poussent des arbres minces battants aux quatre vents, d'immenses rochers où une simple chaîne sépare du vide les marcheurs enthousiastes et des marches... et encore des marches... et plus de marches. Nos fesses étaient maintenant en feu depuis au moins 2 heures lorsque nous avons repéré notre hôtel. Le Payunlou Hotel est une gigantesque bâtisse avec un lobby digne d'un établissement 4 étoiles et c'est avec joie que nous avons trouvé notre petite chambre constituée de trois lits à deux étages et de 3 touristes chinoises relaxant à leur aise sur leur lit. Ensuite, nous avons exploré quelques pistes au sommet, mais en nous gardant tout de même une petite gêne, car chaque escalier descendu devait ensuite être remonté pour rejoindre notre lit! La visibilité de cette première journée était splendide, notre position juste au sommet des nuages nous donnant l'impression d'avoir atteint un autre monde, séparé de celui des mortels au plancher des vaches par une barrière flottante. Il faut croire que même à cette altitude le Baijo coulait à flot et une rencontre avec un groupe d'homme d'affaires chinois en état avancé de ''party'' s'est rapidement transformé en photo-shoot quand un moins gêné m'a saisi par le bras pour que je fasse un tumb-up dans sa photo.  Il était d'ailleurs toujours amusant de voir la réaction des femmes chinoises quand je leur confirmais que la jeune poulette m'accompagnant était en fait ma mère et ils nous regardaient ensuite attendrie en disant l'équivalent en mandarin de ''Ahhh, that's soooo nice!''.



Nous sommes revenus à l'hôtel à la tombée de la nuit parce que le divertissement de fin de soirée est généralement plutôt inexistant à 1000 mètres d'altitude.  Après voir goulûment dévoré notre ration de nouilles instantanées nous nous sommes glissés dans notre sac de couchage pour se reposer un peu. L'alarme était prête pour 4h du matin quand nous allions nous lever pour escalader un sommet et tenter d'y voir le lever du soleil. À la micro lampe de poche (et véritablement de la grosseur de celle qu'un dentiste utilise pour vous regarder les amygdales), nous savions que ce serait intéressant...    

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